Le décès de Claire suscite des changements
31 octobre, 2011
Raeline McGrath a tout risqué en luttant pour la mémoire de Claire.
Après le décès de Claire, sa fille de neuf ans, Raeline a mis en jeu des amitiés et son emploi d’infirmière qu’elle adorait dans un hôpital de Terre-Neuve-et-Labrador.
« Je savais quelles seraient les retombées, dit-elle. Je savais, sans l’ombre d’un doute, que je serais qualifiée d’ingrate – que je serais vue comme une mère qui cherchait désespérément à blâmer quelqu’un pour la mort de sa fille. »
Raeline a essayé de taire ses inquiétudes concernant la mort de Claire. Après tout, elle travaillait comme infirmière dans le même hôpital.
Il aurait été plus facile pour tout le monde que Raeline oublie ses inquiétudes persistantes, qu’elle fasse son deuil un certain temps et qu’elle revienne à l’hôpital auprès de ses collègues attentionnés et compréhensifs.
« Je vois ces gens tous les jours, à la cafétéria, dans les couloirs, de l’autre côté du lit. Je savais que cela finirait mal. »
Mais Raeline et son mari, David, avaient été trop attachés à Claire de son vivant pour l’abandonner après sa mort. Claire était née avec une maladie génétique, la trisomie 13, et elle souffrait d’un grave retard de développement.
Claire marchait avec difficulté. Elle ne parlait pas, mais communiquait par des dessins, des gestes et des actions. Ses soins étaient constants et commençaient souvent à 4 h 30 du matin.
« Nous étions très fiers de veiller à ce qu’elle soit en sécurité et en santé », explique Raeline.
Claire est décédée en mars 2008, après 16 jours passés aux soins intensifs, à la suite d’une intervention chirurgicale visant à réparer une malformation dans son crâne. Après l’intervention, Claire avait été placée dans un sommeil profond et sous ventilateur. Elle a finalement succombé à des complications, notamment à une pneumonie.
Lorsque Raeline a commencé à se pencher discrètement sur les circonstances du décès, elle a découvert des informations sur les possibles causes, notamment une mauvaise gestion de la sonde d’intubation endotrachéale et du ventilateur. Elle avait alors fait part de ses inquiétudes à l’autorité régionale de la santé, Eastern Health, qui a ordonné un examen externe, à la mi-2008.
L’examen a révélé que la gestion du ventilateur avait été en deçà des normes acceptées. Il a aussi révélé que le décès de Claire avait été précipité par une augmentation soudaine du dioxyde de carbone. La cause la plus probable du décès était le blocage du tube endotrachéal. L’examen a conclu que le décès de Claire était évitable.
Les tensions étaient déjà vives à l’hôpital après le décès de Claire, en particulier au moment où Raeline a demandé une révision du cas. Une photo de Claire, qui était affichée à l’unité des soins intensifs pédiatriques, a été retirée.
« Ils étaient dévastés quand Claire est décédée, affirme Raeline. C’était une des leurs. Ils avaient le sentiment d’avoir fait tout ce qu’ils pouvaient et étaient frustrés que je ne voie pas ce côté des choses.
En tant que mère, j’avais besoin de réponses. Mais j’en avais également besoin comme infirmière. Je travaillais dans la même unité de soins intensifs. J’avais besoin de savoir que nous avions fait tout ce que nous pouvions pour Claire. »
La conclusion de l’examen, selon laquelle le décès était évitable, était le pire résultat pour tous – tant pour le personnel de l’hôpital que pour la famille de Claire. L’autorité de la santé a cependant organisé un groupe de discussion avec le personnel de l’hôpital, a communiqué ouvertement avec Raeline et David et leur a présenté des excuses pour le décès de Claire.
Des changements ont été apportés aux politiques et aux procédures. L’unité de soins intensifs pédiatriques est désormais plus ouverte aux membres de la famille. Mais Raeline a senti qu’elle devait quitter l’hôpital et accepter un autre poste d’infirmière dans la région sanitaire.
« Je me suis demandé si cela avait valu la peine, explique Raeline. Je ne pense pas avoir eu le choix. Si nous voulions aller de l’avant, si le décès de Claire doit avoir un sens, alors j’ai fait ce que j’avais à faire… pour améliorer les choses pour la prochaine Claire. »
Elle veut que ses anciens collègues sachent qu’elle croit profondément à la transparence et a la responsabilité dans les soins de santé. Elle n’oubliera jamais les excuses qu’une infirmière lui a présentées.
« Si j’ai fait quelque chose qui, sans le savoir, a contribué à la mort de Claire, lui avait dit cette femme, j’en suis sincèrement désolée. »
Raeline et David ont été profondément touchés. Raeline s’est dit : « Nous sommes si chanceux que cette infirmière ait pris soin de Claire. »
Et c’est à ce moment qu’elle a su au fond d’elle-même qu’elle avait confié les soins de Claire aux bonnes personnes.
« Alors, est-ce que je le referais? Oui, dit-elle. Je confierais Claire aux mêmes personnes. Aux mêmes personnes. Au même endroit.
J’aurais aimé qu’ils fassent les choses différemment. J’aurais aimé qu’ils acceptent que les choses puissent être faites différemment. Mais je ne leur en veux pas. »
L’histoire de Claire souligne l’importance de lutter pour des soins sécuritaires et de n’accepter rien de moins.