Les soins virtuels ont le vent en poupe tant le nombre de prestataires qui y ont recours ne cesse d’augmenter. La pandémie a fait ressortir les nombreux avantages d’offrir aux patients des soins à domicile et au sein de leur communauté, notamment l’amélioration de l’efficacité et de l’accès aux soins.
Comme de plus en plus de soins sont offerts par vidéoconsultation, par téléphone, par courriel et par messagerie sécurisée, il devient particulièrement nécessaire de veiller à ce qu’ils soient effectués de manière sûre et appropriée. Les prestataires de soins primaires ont besoin d’outils et de afin d’évaluer la pertinence des soins virtuels dans leurs milieux de soins particuliers et de prendre des décisions en partenariat avec leurs patients.
ESC a invité des prestataires de soins travaillant dans deux milieux différents à faire part de leur avis sur les soins virtuels, l’importance de la « pertinence » et les façons d’aborder cette question.
Soins virtuels dans les programmes de réadaptation de groupe
Lindsay Hansen et Carolyn MacPhail
Programmes de réadaptation pulmonaire et cardiaque, Santé Î.-P.-É.
Sur l’Île-du-Prince-Édouard, des programmes de réadaptation pulmonaires et cardiaques de douze semaines sont disponibles en complément d’un traitement médical. Ils sont axés sur l’apprentissage et les exercices physiques des patients. Au cours de la pandémie de COVID-19, ces programmes ont été repensés pour un environnement virtuel. Aujourd’hui, la clinique les offre en personne et en ligne.
Le meilleur atout du mode virtuel est incontestablement l’amélioration de l’accès aux programmes. La téléconsultation permet de couvrir une zone géographique plus étendue et un plus grand nombre de participants. Elle permet également aux patients d’économiser du temps et de l’argent : plus besoin de s’absenter du travail pendant aussi longtemps ou de dépenser de l’essence.
« L’intérêt en est d’autant plus grand que notre programme est organisé à l’échelle provinciale. Le mode virtuel en a accru la portée auprès de la population de patients de l’île » explique Lindsay Hansen, responsable de programme.
Cependant, les soins virtuels présentent également des défis. Certains patients ne sont pas à l’aise avec la communication en ligne ou n’ont pas accès aux technologies nécessaires. La clinique doit alors engager des ressources pour équiper les patients, allant de la formation à la fourniture de tablettes avec connexion cellulaire. Par ailleurs, certains examens, tels que la spirométrie, ne peuvent pas être pratiqués en ligne et il est difficile pour les cliniciens de donner des conseils pratiques par écrans interposés, comme corriger les techniques d’utilisation d’un inhalateur.
C’est pourquoi la pertinence implique un certain équilibre. « Il est très difficile pour nous de créer un algorithme permettant de déterminer la pertinence des soins virtuels pour l’ensemble des patients, car cette décision doit être prise au cas par cas », souligne
Cela sous-entend que les prestataires doivent être prêts à évaluer et accompagner l’utilisation des soins virtuels pour chaque patient, au début et tout au long du parcours de soins.
Les cliniciens doivent savoir comment identifier le niveau de confort et la capacité des patients par rapport aux soins virtuels et comment aborder le sujet afin de les encourager à adopter ce type de consultation. Selon Carolyn MacPhail, gestionnaire chargée de la supervision du programme chez Santé Î.-P.-É, il n’existe pas d’approche unique à l’évaluation de la pertinence, mais une liste de caractéristiques des patients pour qui les soins virtuels présentent un avantage peut aider les cliniciens.
Pour aider les patients à se connecter à distance et de façon positive et sûre, les cliniciens doivent également être en mesure d’évaluer avec précision les capacités et les ressources dont disposent actuellement leurs cliniques ou cabinets ainsi que celles qu’il reste encore à développer, car les soins virtuels concernent les prestataires comme les patients.
Soins virtuels : point de vue d’un médecin
Alex Singer, MB BCh BAO, CCFP
Directeur, Bureau de la recherche et de l’amélioration de la qualité, Département de médecine familiale à l’Université du Manitoba
Directeur, Réseau de recherche en soins primaires du Manitoba (MaPCReN)
Alex Singer se considère comme un « pionnier » dans le domaine, ayant été un des premiers à adopter et étudier l’utilisation des technologies dans la prestation de soins primaires depuis de nombreuses années. Selon lui, la pandémie a permis aux soins virtuels de sortir de leur bulle pour devenir une pratique presque routinière pour beaucoup de ses pairs en très peu de temps.
Étant donné le contexte actuel, il insiste sur la nécessité pour les prestataires de soins primaires, les gouvernements et les organismes de réglementation de faire le bilan des enseignements et d’intégrer les données probantes émergentes ainsi que les pratiques exemplaires dans un nouveau modèle de délivrance des soins virtuels. Cela permettrait d’éviter d’offrir automatiquement les soins virtuels ou sans avoir systématiquement évalué leur pertinence.
« Nous devons nous adapter à quelque chose de nouveau et de contextuel, explique Alex Singer, et je ne pense pas qu’il soit possible de codifier la pertinence sous forme de liste. La pertinence doit être un ensemble de principes ancrés dans la médecine fondée sur des données probantes et qui reconnaît les nombreux écarts auxquels nous faisons face aujourd’hui. »
Il soutient que l’évaluation de la pertinence est cohérente avec d’autres grands principes directeurs et compétences en lien avec la prestation de soins de santé, tels que la capacité d’écoute, la prise en compte adéquate des antécédents ainsi que la reconnaissance des valeurs et des limites des patients comme faisant partie des données disponibles.
Ceci dit, l’évaluation de la pertinence est complexe en raison du grand nombre de facteurs devant être considérés. Offrir des soins adaptés en partenariat avec les patients requiert dialogue et engagement et peut être très consommateur de ressources.
Alex Singer précise que c’est la raison pour laquelle les prestataires de soins primaires ont besoin de meilleurs cadres et lignes directrices qui décrivent les facteurs à considérer pour déterminer s’il est pertinent d’avoir recours aux soins virtuels. Ils s’avèreront plus utiles que des règles prescriptives.
L’élaboration de ces cadres est essentielle à une bonne prise de décisions par les cliniciens eux-mêmes et en partenariat avec leurs équipes respectives et leurs patients, et ainsi aider à l’amélioration des politiques et réglementations.
Soins virtuels : des choix pertinents au cœur de votre pratique
Excellence en santé Canada vient de lancer une nouvelle initiative qui permet aux prestataires de soins primaires et aux patients de déterminer quand et comment utiliser les soins virtuels, ensemble.
Les participants au projet collaboratif Partenariat sur les soins virtuels appropriés auront accès à des données probantes récentes, à un réseau de formateurs et de pairs et à un financement de démarrage pouvant atteindre 20,000 $ pour créer un cadre qui les aidera à prendre des décisions liées aux soins virtuels appropriés et sûrs.
Pour intégrer la prochaine cohorte, déposez votre candidature avant le 15 janvier 2023!